Yann Furic
B.B.A., M. Sc., CFAMD
Gestionnaire principal, répartition d’actifs et stratégies alternatives
Ce qui a fait bouger les marchés :
Nouvelle baisse de taux de 0,50 % de la Banque du Canada.
Positionnement des marchés face à un deuxième mandat de Donald Trump à la présidence des États-Unis.
SURVOL DES BOURSES MONDIALES |
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Pays |
Indice |
Rendement |
Évolution |
Rendement cumulatif |
Canada |
S&P/TSX |
0,85 % |
18,24 % |
|
États-Unis |
S&P 500 |
2,25 % |
27,88 % |
|
|
Nasdaq |
2,67 % |
28,16 % |
|
Bourses internationales |
EAEO |
-2,43 % |
12,95 % |
|
Pays émergents |
|
-1,41 % |
18,05 % |
|
Chine |
MSCI Chine |
-2,920 % |
28,64 % |
Le rendement indiqué est le rendement total qui inclut le réinvestissement des revenus et des distributions de gains en capital.
Source : Morningstar Direct.
Résultats – obligations canadiennes
L’indice des obligations universelles FTSE Canada, regroupant les obligations, a affiché un rendement positif de 3,21 % depuis le début de l’année (au 31 octobre 2024).
Source : Morningstar Direct.
Notre analyse des évènements
L’inflation recule encore, et le marché de l’emploi aussi
- Le 7 novembre dernier, la Réserve fédérale américaine (Fed) a procédé à une réduction du taux directeur de l’ordre de 0,25 %. Le taux d’escompte est ainsi passé de 5,00 % à 4,75 % et le marché anticipe la possibilité d’une autre coupure en 2024.
- Pour sa part, la Banque du Canada (BdC) a abaissé son taux directeur de 0,50 % le 23 octobre. Quoique son mandat se concentre essentiellement sur le contrôle de l’inflation, la banque centrale canadienne veut aussi favoriser le maintien et le développement du marché de l’emploi, à l’instar de la Fed. Des deux côtés de la frontière, l’emploi est donc devenu la variable la plus importante, l’inflation semblant désormais sous contrôle. Le marché prévoit une nouvelle annonce de coupure du taux directeur de la part de la BdC en décembre, mais son ampleur (0,25 % ou 0,50 %), est encore incertaine.
- L’économie américaine reste toujours vigoureuse, ce qui réduit l’urgence d’une réduction des taux. Cette divergence entre les politiques monétaires canadienne (plus de baisses) et américaine (moins de baisses) aura pour conséquence principale de réduire la valeur du dollar canadien. Par ailleurs, les hostilités au Moyen-Orient et une remontée de l’économie chinoise pourraient entraîner une augmentation du prix du pétrole, ce qui limiterait la faiblesse de notre devise.
- Les variables ayant le plus d’impact sur les marchés restent toujours le taux d’inflation et la vitesse à laquelle il décroît. Cependant, la situation de l’emploi et la fréquence des baisses de taux sont maintenant des variables aussi importantes, sinon plus.
- Au Canada, le taux d’inflation annuel s’établissait à 1,6 % pour le mois de septembre, en baisse par rapport au mois précédent (2,0 %) et évoluant dans un sens positif. Aux États-Unis, le taux d’inflation annuel s’est resserré à 2,4 % en septembre, un recul par rapport au mois précédent.
- Le programme politique protectionniste de la nouvelle administration Trump et sa mise en œuvre seront parmi les variables les plus importantes de 2025.
Comment les marchés peuvent-ils influencer les décisions politiques?
Le marché obligataire et le pouvoir politique entretiennent une relation étroite et complexe. Les décisions prises par une administration publique sous la gouverne d’un parti au pouvoir doivent souvent se plier aux exigences du marché, au risque de subir la grogne des investisseurs. En voici quelques exemples :
- Dans le cas de la nouvelle administration Trump, des politiques fiscales qui augmenteraient les déficits et la dette américaine pourraient déclencher un évènement Liz Truss, du nom de la première ministre britannique qui avait succédé à Boris Johnson dans ce poste en 2022. Dans cette situation particulière, la volonté de la première ministre, à la fois de réduire les impôts et d’augmenter les déficits, avait été perçue par les marchés obligataires comme une décision irresponsable. Cette réprobation s’était traduite par une forte augmentation des taux demandés par les investisseurs et une perte de valeur importante des actifs des régimes de pension britanniques. Ce fort signal envoyé par les marchés, indiquant clairement que le coût de financement de la dette publique serait beaucoup plus dispendieux, avait rapidement obligé le gouvernement à faire volte-face.
- Durant la présidence Clinton dans les années 1990, la crainte de déficits élevés avait eu pour résultat une augmentation rapide des taux d’intérêt sur les obligations à échéance de 10 ans, qui étaient passés de 5,2 % à 8,0 %. Face à cette flambée des taux, l’administration fédérale avait dû revoir et réduire ses prévisions de déficits.
- Actuellement, la France est confrontée à une augmentation des coûts de son financement parce que ses déficits sont considérés trop importants, selon les critères d’inclusion dans la zone euro.
Ce qu’il faut en conclure, c’est que le marché obligataire peut dicter les limites des déficits et de la dette qu’un pays peut atteindre. Ce pouvoir que détient le marché pourrait empêcher une nouvelle administration américaine de mettre en place à la fois des réductions d’impôts et des tarifs sur les importations.
Quelques scénarios toujours possibles d’ici la fin de 2024
- Le scénario le plus positif consisterait en une réduction des taux due uniquement à un recul de l’inflation, sans ralentissement économique prononcé. En date de cet exposé, l’économie américaine se porte toujours bien.
- Une économie américaine forte, qui requiert moins de réductions de taux, pourrait entraîner une appréciation du dollar américain face aux autres devises. Cette conjoncture serait négative pour la devise canadienne et maintiendrait une inflation plus élevée au pays.
- La dernière hypothèse reste encore celle d’une inflation en réaccélération alors que, côté économie, la situation se détériore, ce qui indiquerait un état de stagflation et serait le scénario le plus négatif. Ce scénario semble de moins en moins plausible considérant la baisse continue de l’inflation à laquelle nous assistons. Cependant, des politiques plus protectionnistes sous une nouvelle administration Trump pourraient générer une remontée de l’inflation.
Situation de l’emploi
Au Canada, le taux de chômage a légèrement diminué, passant de 6,6 % à 6,5 % en octobre. Seulement 14 500 emplois ont été créés, principalement à temps plein, alors que les attentes étaient de 27 200 nouveaux postes. La croissance du salaire horaire est restée trop élevée à 4,9 % sur une base annuelle, quoiqu’en baisse par rapport au mois précédent.
Les dernières données concernant l’emploi aux États-Unis dénombraient la création de 12 000 nouveaux postes alors que les attentes étaient de 100 000. Les ouragans qui ont durement frappé la Floride auraient eu un impact très négatif sur l’emploi. Le taux de chômage était à 4,1 %, stable par rapport au mois dernier. Pour ce qui est de la croissance des salaires, elle est encore trop élevée à 4.0 %.
Indicateurs économiques
Indice global des directeurs d’achats
Les indicateurs du secteur manufacturier se sont améliorés, près de la moitié des trente pays affichant un indice supérieur à 50 (expansion). Le secteur des services reste vigoureux.
Taux d’inflation
Sur une base globale, l’inflation diminue et continue d’évoluer dans la bonne direction, ce qui devrait permettre aux banques centrales de débuter ou de poursuivre leurs baisses de taux. En 2025, l’imposition sans discernement et à l’échelle mondiale de tarifs par la nouvelle administration Trump pourrait cependant exercer des pressions inflationnistes et limiter la marge de manœuvre de la Fed.
Taux directeurs au Canada, en Europe et aux États-Unis
Les taux d’intérêt sont à un niveau élevé depuis un certain temps maintenant, mais plusieurs banques centrales ont débuté leur cycle de baisse. Les renouvellements prochains des prêts hypothécaires et corporatifs pourraient forcer les consommateurs et les entreprises à réduire dès maintenant leurs dépenses, en anticipation de taux plus élevés qu’initialement prévu.
Notre veille stratégique
Nous suivons l’évolution de l’inflation et des dépenses des consommateurs, ainsi que les indicateurs avancés concernant la production manufacturière et le secteur des services et de l’emploi.
La prudence et la gestion des risques restent toujours nos priorités.
Tactiquement
En octobre, nous avons maintenu la pondération des actions dans la stratégie de répartition tactique, les perspectives économiques et les indicateurs de marchés commandant toujours une surpondération.
Aux États-Unis, nous avons conservé notre positionnement dans les titres de croissance de grandes capitalisations qui réagissent positivement à une stabilisation des taux d’intérêt et dans ceux qui ont un historique de croissance des dividendes qui sont plus défensifs.
Nous avons augmenté notre position dans les titres de petites capitalisations qui réagissent bien à des baisses de taux et diminué celle des pays émergents, la vigueur du dollar américain ayant un effet négatif sur ces pays. Nous avons également favorisé un retour vers la zone européenne et le Japon.
Du côté du revenu fixe, nous avons augmenté la pondération des obligations fédérales et corporatives canadiennes à courte échéance et réduit celle des obligations à haut rendement ainsi que celle des pays émergents.
Nous continuons de privilégier les titres dans les pays développés et la gestion des risques.
Pour savoir comment nos fonds se sont comportés :
Principaux risques
- Des politiques protectionnistes tous azimuts aux États-Unis, sans gains de productivité importants, devraient augmenter l’inflation et ralentir les baisses de taux. Notre devise serait désavantagée puisque l’économie canadienne n’est pas aussi vigoureuse que celle de nos voisins du sud.
- Une politique monétaire trop restrictive pourrait causer une récession importante ou d’autres problèmes comme la crise dans les banques régionales américaines.
- Un risque se manifeste sur le plan des politiques monétaires: à preuve, l’augmentation des taux au Japon qui a eu un effet marqué sur l’ensemble des marchés de la planète.
- Des taux élevés durant une période prolongée auraient comme conséquence de réduire les profits des entreprises et aussi, de façon importante, les dépenses des ménages.
- La possibilité d’un épisode de stagflation, c’est-à-dire d’une croissance économique anémique et d’une inflation élevée, est toujours présente. Cette situation est négative pour les marchés boursiers.
- Le conflit israélo-palestinien pourrait avoir des répercussions sur l’ensemble du Moyen-Orient.
Gestionnaire principal, répartition d’actifs et stratégies alternatives
Source des données : Bloomberg
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