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Yann Furic
B.B.A., M. Sc., CFAMD

Gestionnaire principal, répartition d’actifs et stratégies alternatives

La nouvelle administration américaine a provoqué une véritable révolution en imposant des tarifs tous azimuts.

L’intégration des trois économies nord-américaines devrait provoquer une renégociation de l’Accord CanadaÉtats-UnisMexique (ACEUM) plus tôt que tard.

L‘utilisation de tarifs dans le cadre de négociations commerciales sera une variable supplémentaire à suivre en 2025, en plus de l’inflation et de l’emploi.

ÉCONOMIE AMÉRICAINE VS ÉCONOMIE MONDIALE : INSTABILITÉ ET INCERTITUDE

 

Le mois de février 2025 a été très influencé par de fortes tensions commerciales et cette situation se poursuit toujours en mars.

Des tarifs tous azimuts

Depuis plus de trente ans, les chaînes d’approvisionnement mondiales se globalisent et s’optimisent, ce qui a eu pour conséquence une baisse des coûts de production. Au fil du temps, certaines mesures ont été mises en place pour différentes raisons dans plusieurs pays, notamment le protectionnisme dans certains secteurs d’activités, des quotas et des tarifs.

Après plusieurs semaines de menaces, la nouvelle administration américaine a provoqué une véritable révolution en imposant des tarifs tous azimuts qui visent plusieurs buts à la fois, autant commerciaux que de sécurité nationale. L’impact primordial de ces changements a été de réduire de façon draconienne l’efficacité des chaînes d’approvisionnement et d’augmenter le prix des biens produits.

Effets sur l’économie

Globalement, la quasi-entièreté de l’économie mondiale sera touchée à différents degrés, ce qui aura un impact sur la croissance économique.

La croissance économique américaine, sous l’impulsion de l’administration Trump, sera fort probablement moins forte qu’anticipée. De plus, l’inflation devrait rester à un niveau élevé, ce qui ne permettra pas à la Réserve fédérale américaine (Fed) d’abaisser son taux directeur, sauf en cas de ralentissement économique doublé de pertes d’emplois. Ce ralentissement de la croissance économique anticipée se reflètera aussi sur la valeur du dollar américain, qui devrait se dévaluer par rapport aux autres devises, telles que l’euro.

Les États-Unis pourraient donc subir un épisode de stagflation, durant lequel la croissance économique stagne alors que l’inflation se fait persistante.

Le thème de l’intelligence artificielle (IA) reste toujours très présent, mais l’arrivée du modèle chinois DeepSeek qui, selon les médias, est performant et moins dispendieux, est venu jeter une ombre sur les initiatives américaines, alors même que la rentabilité de ces nouveaux outils pour leurs développeurs n’est pas encore connue. La question se pose : les profits de cette entreprise seront-ils au rendez-vous?

De façon très générale, les indices boursiers fluctuent au jour le jour, mais sur le moyen et le plus long terme, ce sont les profits des entreprises qui les composent et leur croissance anticipée, en plus des taux d’intérêt (principalement d’un terme de 10 ans), qui définissent le niveau des indices boursiers.

Et l’ACEUM?

Au Canada comme au Mexique, l’imposition de tarifs va ralentir l’économie. L’intégration des trois économies nord-américaines devrait provoquer une renégociation de l’Accord CanadaÉtats-UnisMexique (ACEUM) plus tôt que tard. L’incertitude du moment limite les dépenses des entreprises dans de nouveaux projets et réduit la confiance des consommateurs ainsi que leurs achats, ce qui pourrait entraîner une récession dans les trois pays concernés.

Dans le cas du Canada, une inflation sous contrôle devrait donner une marge de manœuvre à la Banque du Canada pour abaisser son taux directeur.

Économies européennes

À la suite des élections en Allemagne et des menaces des États-Unis de se retirer de l’OTAN, les pays d’Europe sont prêts à mettre de l’avant un plan de défense qui entraînera des dépenses militaires importantes. L’Allemagne veut même s’engager dans des déficits importants pour y arriver. La croissance économique européenne est faible, mais l’inflation l’est également. Les politiques monétaires (baisse des taux) et fiscales (augmentation des dépenses des gouvernements) devraient relancer cette croissance. Depuis le début de l’année, les marchés boursiers européens affichent de meilleurs résultats que l’indice américain S&P 500.

Ailleurs dans le monde

Pour ce qui est des pays émergents, une dévaluation du dollar américain serait propice à leur croissance économique. La Chine a, pour sa part, annoncé depuis plusieurs mois des mesures visant à dynamiser son économie.

En somme, les pays qui auront les moyens de relancer leur économie, que ce soit au moyen de stimulus fiscaux ou monétaires, pourront affronter les mesures protectionnistes ambiantes.

 

Ce qui a fait bouger les marchés en février :

  • Marchés majoritairement à la baisse à la fin du mois.
  • Volatilité en hausse à cause des menaces tarifaires.

 

SURVOL DES BOURSES MONDIALES
Tous les pourcentages affichés sont en devise canadienne.

Pays

Indice

Rendement
(du 1er au 28 février 2025)

Évolution

Rendement cumulatif
(depuis le 1er janvier 2025)

Canada

S&P/TSX

-0,40 %

3,06 %

États-Unis

S&P 500

-1,83 %

1,61 %

Nasdaq

-4,42 %

-2,15 %

Bourses internationales

EAEO

1,40 %

7,47 %

Pays émergents

-0,05 %

2,45 %

Chine

MSCI Chine

11,17 %

12,98 %

Le rendement indiqué est le rendement total qui inclut le réinvestissement des revenus et des distributions de gains en capital.

Source : Morningstar Direct.

Résultats – obligations canadiennes

L’indice des obligations universelles FTSE Canada, regroupant les obligations, a affiché un rendement positif de 2,31 % depuis le début de l’année (au 28 février 2025).

Source : Morningstar Direct.

Notre analyse des évènements

Entête panorama mars

  • Le 19 mars, la Réserve fédérale américaine devrait conserver ses taux à leur niveau actuel. De plus, la politique tarifaire américaine, qui sera inflationniste, pourrait limiter les coupures en 2025.
  • La Banque du Canada a abaissé son taux directeur de 0,25 % le 12 mars, l’inflation se maintenant dans sa fourchette cible. L’incertitude concernant l’imposition de tarifs par les États-Unis pourrait modifier la politique monétaire et mener à des baisses de taux supplémentaires. Présentement, les marchés anticipent de deux à trois coupures de taux cette année.
  • La création d’emplois aux États-Unis a été plus faible que prévu en février avec la création de 151 000 emplois face à des attentes de 160 000. L’inflation salariale est trop élevée à 4 %, comparativement à l’année dernière. Le taux de chômage a augmenté de 0,1 %, se situant maintenant à 4,1% alors que le nombre moyen d’heures travaillées a légèrement diminué.
  • La création de 1100 emplois au Canada en février s’est révélée bien en deçà des attentes de 20 000, alors qu’en janvier, 76 000 nouveaux travailleurs avaient intégré le marché par rapport à des attentes de 25 000. Le taux de chômage a fléchi. La croissance des salaires, sur une base annuelle, est encore élevée à 4 %.
  • Le fait que l’économie américaine soit toujours vigoureuse réduit l’urgence pour la Fed de baisser les taux aux États-Unis. La conséquence principale d’une divergence entre les politiques monétaires canadienne (plus de baisses) et américaine (moins de baisses) sera de réduire la valeur du dollar canadien, un phénomène que nous avons observé depuis un certain temps.
  • L’utilisation de tarifs dans le cadre de négociations commerciales sera une variable supplémentaire à suivre en 2025, en plus de l’inflation et de l’emploi.
  • Au Canada, le taux d’inflation annuel s’établissait à 1,9 % pour le mois de janvier, en hausse de 0,1% face au mois précédent (1,8 %), mais toujours à l’intérieur de la cible visée par la Banque du Canada. Aux États-Unis, le taux d’inflation annuel s’est accéléré à 3 % en janvier.

Quelques éléments à considérer pour les prochains mois

  • La réduction de la règlementation dans divers secteurs d’activités aux États-Unis devrait permettre de maintenir la croissance économique et favoriser l’investissement des entreprises. Cette tendance vers la dérèglementation devra être suivi par d’autres pays, comme le Canada, au risque d’une perte de compétitivité.
  • Une guerre commerciale soutenue par l’utilisation de tarifs sans discrimination pourrait causer un ralentissement économique et augmenter l’inflation, ce qui se rapprocherait d’un épisode de stagflation, le scénario économique le plus négatif.
  • Il est fort probable que tous les scénarios inflationnistes qui auraient pour conséquence de conserver les taux d’intérêt pour les échéances de cinq à dix ans à des niveaux élevés seront évités. Un tel scénario ralentirait les investissements des entreprises et le rapatriement des chaînes de production aux États-Unis.
  • L’incertitude géopolitique continuera d’être présente avec la guerre Russie-Ukraine, les conflits régionaux au Moyen-Orient et les tensions entre les États-Unis et la Chine ainsi que l’annexion possible de Taiwan.

Indicateurs économiques

Indice global des directeurs d’achats 

Les indicateurs du segment manufacturier sont restés stables, près de la moitié des trente pays qui le composent affichant un indice supérieur à 50 (expansion). Le segment des services continue de s’améliorer et reste vigoureux.

Taux d’inflation

Sur une base globale, l’inflation diminue et continue d’évoluer dans la bonne direction, mais sa vitesse de décélération s’affaiblit. Les banques centrales n’effectueront probablement pas le même nombre de coupures de taux que ce qui était anticipé il y a quelques mois. De son côté, l’imposition de tarifs à l’échelle mondiale et sans discrimination par la nouvelle administration pourrait créer des pressions inflationnistes en 2025.

Taux directeurs au Canada, en Europe et aux États-Unis 

Les taux d’intérêt sont à la baisse depuis quelques mois maintenant. Les craintes d’une reprise de l’inflation aux États-Unis devraient limiter les baisses de taux. A l’opposé, le Canada et l’Europe font face aux menaces tarifaires et leur inflation, plus faible, permet à leurs banques centrales d’abaisser encore leurs taux.

Panorama financier stratégie

Nos vues tactiques

En février, nous avons augmenté la pondération des actions dans la stratégie de répartition tactique, principalement en Europe, au Japon et en Australie (EAFE), ainsi que dans les pays émergents qui bénéficient d’un dollar américain plus faible.

Aux États-Unis, nous avons conservé notre positionnement dans les titres de croissance de grandes capitalisations qui réagissent positivement à une stabilisation des taux d’intérêt et dans ceux qui ont un historique de croissance des dividendes qui sont plus défensifs.

Nous avons maintenu notre position dans les titres de petites capitalisations qui réagissent bien à des baisses de taux et à une diminution probable de la règlementation dans plusieurs domaines.

Dans la composante revenu fixe, nous avons réduit le poids des obligations, mais augmenté leur qualité en ne détenant que des obligations gouvernementales canadiennes et américaines.

Nous continuons de privilégier les titres dans les pays développés et la gestion des risques.

Pour savoir comment nos fonds se sont comportés :

Voir nos rendements

 

Yann Furic, B.B.A., M. Sc., CFA
Gestionnaire principal, répartition d’actifs et stratégies alternatives

Source des données : Bloomberg

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