Prévoir l’imprévisible
Planifier votre succession, ce n’est pas seulement vous demander comment et à qui vous allez léguer vos biens et qui administrera votre succession. Faire votre planification testamentaire, c’est également prévoir ce qu’il adviendra de vos biens si vous devenez inapte.
Qui pourra consentir aux soins de santé qui vous seront requis, ou les refuser, si vous n’êtes pas en mesure d’exprimer vos volontés?
Pouvez-vous décider à l’avance de ce qui vous arrivera, même si vous n’êtes plus en mesure de verbaliser ou d’écrire vos choix?
Une année particulière
Le contexte actuel de la pandémie est tout indiqué pour faire réfléchir davantage aux questions relatives à votre planification successorale et au type de soins que vous désirez ou ne désirez pas recevoir.
À cause de sa virulence, la COVID-19 peut entraîner l’hospitalisation et, dans certains cas, les patients doivent être intubés et branchés sur un respirateur pour les aider à respirer. Cette situation de pandémie remet au premier plan l’importance de préciser et de faire connaître vos volontés quant à une potentielle hospitalisation, intubation et ventilation artificielle, mais également pour tout ce qui concerne vos soins de santé généraux.
DMA : bien comprendre
Depuis le 10 décembre 2015, il est possible de signer des Directives médicales anticipées (DMA). Ce document permet à toute personne majeure et apte de formuler à l’avance ses volontés quant à ses traitements de fin de vie, en prévision de son inaptitude à consentir à des soins visés par la Loi concernant les soins de fin de vie (la Loi)1.
Le document parle donc à votre place aux intervenants de la santé afin de les informer des soins qui doivent vous être administrés, si vous êtes dans l’impossibilité d’exprimer directement vos volontés. Ces DMA ont une valeur contraignante. Les intervenants se doivent de les suivre, et ce, sans intervention d’un membre de votre famille. Les DMA évitent à vos proches de devoir prendre cette décision à votre place.
Portée des DMA
Il faut savoir que les directives médicales anticipées ne couvrent que cinq soins de santé et qu’elles ne sont applicables que si vous vous retrouvez dans l’une des trois situations cliniques visées par la Loi.
Les cinq soins visés par la Loi
- Réanimation cardiorespiratoire
- Ventilation assistée par un respirateur
- Dialyse
- Alimentation et hydratation forcées
- Alimentation et hydratation artificielle
Les trois situations cliniques visées par la Loi
- Situation de fin de vie : condition médicale grave et incurable.
- Atteinte sévère et irréversible des fonctions cognitives : par exemple, état comateux jugé irréversible.
- Autre situation d’atteinte sévère et irréversible des fonctions cognitives : par exemple, Alzheimer ou démence avancée.
Il est important de noter qu’il n’est pas possible de demander l’aide médicale à mourir par l’entremise des DMA. L’aide médicale à mourir ne peut être demandée à l’avance et vous devez être apte au moment où vous la demandez.
Planifier intelligemment
Les DMA peuvent être signées devant notaire ou devant deux témoins à l’aide d’un formulaire de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). Ces directives peuvent par la suite être enregistrées auprès de la RAMQ dans un registre spécifiquement conçu pour ce type de document ou être déposées dans votre dossier médical en les remettant à votre médecin. Sachez que les DMA peuvent être révoquées à tout moment, tant que vous êtes apte.
Attention aux règles!
Par contre, si vous désirez modifier vos DMA, vous devez en signer de nouvelles qui révoqueront les précédentes. Vous ne pouvez pas simplement les modifier comme vous pourriez le faire pour un testament en signant un codicille ou un document de modification : il faut refaire le document complet.
Ce sont toujours les dernières DMA qui prévalent. Le document consignant vos DMA est un document complémentaire à votre testament et à votre mandat de protection en cas d’inaptitude.
Le testament de fin de vie
Dans le mandat de protection, il peut se trouver des clauses qui concernent vos traitements de fin de vie communément appelées « testament de fin de vie ». Il faut garder en tête que les DMA ne couvrent pas autant de situations médicales ni de choix de soins que le mandat de protection. Le mandat de protection permet donc de couvrir un éventail plus large de situations cliniques et de soins. En conséquence, le mandat de protection conserve toute son utilité, et ce, même si vous avez signé des directives médicales anticipées.
Qui consent aux soins?
En l’absence de DMA et pour les soins non visés par ces dernières, le consentement aux soins sera donné par le mandataire à la personne (nommé dans votre mandat de protection) ou par le tuteur ou le curateur privé (lors d’une ouverture de régime de protection en l’absence de mandat de protection). Si vous n’avez pas de représentant légal, le consentement aux soins sera donné par votre conjoint (marié ou conjoint de fait), par un proche parent ou par une personne qui démontre un intérêt envers vous.
Mais soyez sans crainte, si vous êtes toujours en mesure de consentir à vos soins de santé, vous pourrez les exprimer vous-même verbalement.
La conclusion logique…
N’attendez pas pour planifier les situations qui pourraient se produire et dont les conséquences peuvent être significatives pour vous et vos proches. Il n’est pas question ici de pessimisme ou de négativisme, mais plutôt de vous assurer une qualité de vie qui comble vos attentes.
En comprenant bien la portée des différents outils qui sont à votre disposition, vous pourrez prendre les meilleures décisions. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à nous les poser : nous voulons vous aider à bien planifier chacune des étapes de votre vie, afin qu’elles vous procurent toute la satisfaction que vous en espérez.
Christelle Malenfant, LL. B., D.D.N., TEP
Notaire, Gestion de patrimoine
1 Loi concernant les soins de fin de vie, RLRQ chap.S-32.0001
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